• L'ivresse de ta mélancolie [privé]


    Mardi 7 Septembre 2021 à 18:53
    AUREUM.UMBRA

    Pomme:

    Au bord d'une rivière à l'eau translucide, trônait un saule pleureur. Géant majestueux dont les branchages s'épuisent vers le sol, il inondait de son ombre la petite clairière. Quelques rayons lumineux s'immisçaient à travers le feuillage, découpant une dentelle harmonieuse en son dessous.

    Au pieds de l'arbre, une floppée de petites pâquerettes couvraient les alentours. Petite fleur parmi ses semblables. Une demoiselle y était assoupie. Un livre abandonné sur son ventre, il lui glissait doucement des doigts - rendus inertes par le sommeil. La tête penchée sur le côté, offrant une vue imprenable sur son épaule dénudée. Sa légère robe violine glissant naïvement contre sa peau délicate.  Les cheveux malmenés par l'attraction, une mèche sombre venait se perdre sur l'arrête de son nez, l'insolente traversant son visage de tout son long. Les lèvres entre ouvertes d'où s'évade une respiration engourdie. Pomme dormait, profondément plongée dans des songes distordus. Elle était bercée par le clapotis incessant du liquide qui se déversait dans une danse gracile entre les rochers couverts de mousse.

    La brune au tint fragile reposait entre les racines saillantes, un panier en osier remplit de champignons difformes et de fleurs colorées abandonné tout prêt sa jambe. Pieds nus, la jeune femme était totalement à la merci de la nature ou de quelconque passager qui s'aventurerait dans ce coin de foret. Innocente créature à la crinière de nuit.

    Ses mains par moment éprises de crispations, son rêve venait de se muer en cauchemars. Maladive de ses nocturnes. Sa tête espiègle fronçant par moment les sourcils au milieu du lierre, témoin du trouble de son subconscient. Pourtant, le temps avait quelque chose de charmant. Une coccinelle se risquant à se déposer sur son bras immobile. Des petits papillons virevoltant un peu plus loin. Une grenouille coassant bien cachée sur son nénuphar, faune mélodieuse. 

    Tout était tranquille, sans vagues, jusqu'au moment où le cadre idyllique accueillit un nouveau perturbateur. Etranger à la mine austère auquel s'offrait la douceur de la scène. Féerie particulière de l'air emplit des saveurs végétales. Rencontre improbable à l'abris de la canopée luxuriante.

    Jeudi 9 Septembre 2021 à 01:09
    Cafevy

    Milo Andrea Santini :

    Doux rayons d'un astre solaire désormais seul maitre en son domaine caressant la peau griffonnée qui s'émerveillait de souvenirs mélancoliques, l'obscurité finissait toujours pas s'effacer et emportait avec elle les bribes d'images récalcitrantes à laisser passer le présent. Passé conjugué à l'amertume et aux regrets. Les chaussures à la main, les herbes folles luxuriantes taquinaient la plante des pieds encore vierge, l'homme profitait de la tendresse maternelle de la nature qui lui en inspirait des plus primaires. Celle de sa propre mère. De celles qu'il cherchait désespérément, à tâtons, dans le noir. Sous les yeux noircit par l'encre, brillaient deux pupilles enflammées qui se repassaient en boucle le film de sa vie, de son enfance. De ces années d'innocences ultimes à courir les pieds nus dans les jardins, à s'écorcher les genoux de cailloux polis par des vies qui commençaient et s'achevaient dans le village de ses primes années.

    Le cœur au bord des lèvres, les larmes aux bord des yeux, à se rappeler l'allégresse qu'il ne connaissait autrefois que de pureté, sans aide pernicieuse et dévorante, se jouait devant lui des scènes quotidiennes, perdu au beau milieu de la nature luxuriante offerte par le parc à l'abandon. Perdu dans le dédale de ses pensées, guidé par cette voix intérieure, celle de l'enfant, qu'il tentait désespérément de protéger de ses excès, de la rudesse du monde, des pièges tendus dans lesquels il était tombé, il écrasait le lourd poids de son existence sur la terre encore fraiche de la mousse qui s'en nourrissait. Il s'était surpris, quelques fois, à passer ses larges mains tannées et baguées sur des fleurs qui s'offraient à lui, au soleil, avides d'une lueur qui faisait terriblement défaut au monde. Rien d'étonnant. Les poitrines assombris et les passions équivoques n'avait pas attendu une pseudo fin du monde pour abattre sur eux leur terrible emprise. Milo en était bien l'exemple même, tenant sur deux perches qui le soutenait à peine.

    Fantôme au teint diaphane trainant sa carcasse sur la croute terrestre, ses orbites noircies finissaient leur course en se heurtant à une bien étrange créature. Effleurant tendre les contours de la nymphe assoupie au pieds de son arbre, il se surprenait à y desceller un de ces chef-d’œuvres de mère patrie auxquels une mère attendrie l'avait exposé, en voyage pour la capitale. Un spectacle attendrissant qui ne représentait qu'à ces yeux la candeur préservée dans ce monde de fous, qui méritait bien mieux que ce qu'il avait à lui offrir de plus terrible. Un peu comme lui. Un peu comme elle, avant que les masques ne tombent et que les démons ne se révèlent avoir des airs d'anges.

    Conscience reprise, honteux d'avoir laissé ses yeux glisser jusqu'à la couverture de son ouvrage, le long de ses mèches retombées sur son visage endormi, Milo s'était repris. Prêt à s'enfuir, à se faire oublier, il avait pourtant vu ces traits d'angelot se froncer, se durcir, s'assombrir, l'espace d'un instant assez long pour ne pas être ignoré.

    Chevalier servant, presque maladif, l'italien n'avait trop su quoi faire, quand d'un pas qu'il voulait leste et sans conséquence, sa jambe se heurtait à une racine plus imposante que les autres qui lui fit perdre l'équilibre. Frayeur subite, plus de peur que de mal: funambule expert, maitre des jeux espiègles, il s'était rattrapé en beauté avant qu'un drame ne soit plus évité.

    Cazzo.

    Murmure qu'il n'avait su, en revanche, rattrapé, se heurtant à l'idyllique peinture à peine croquée d'une nature salvatrice, l'homme espérait secrètement ne pas s'être fait repérer. Figure inquiétante pourtant transpirante de tendresse et de douceur qui en effrayait plus d'un-e. Un ange dans un corps de démon.

    Dimanche 19 Septembre 2021 à 20:07
    AUREUM.UMBRA

    Pomme:

    Une voix inconnue qui se heurte contre ses tympans. Accent italien qui la tire violemment de ses rêveries tourmentées, sauveur à la langue qui fourche. Pomme remue un instant. Ses sourcils se froncent alors qu'elle émerge doucement. Les yeux s'entrouvrent. Ils se heurtent aux rayons diaphanes du jour. Sensation désagréable qui éblouit sa rétine. Battement de cils noircis. Un regard émeraude d'abord flouté qui finit par se stabiliser. Les traits devenus nets. Les feuilles qui ondulent au dessus de sa tête. Le crépitement du bois qui recouvre l'alcôve trahit par quelques pas qui la firent sursauter. Une vérité qui la frappe. Elle n'était pas seule.

    D'un geste craintif, elle se redressa sur ses avant bras. La tête dodelinant encore sous l'enchainement rapide, elle toisa un instant les alentours avant de repérer définitivement l'étranger source de sa discorde. Petit animal effrayé que l'on dérange pendant sa sieste.

    A moitié relevée, les habits toujours en bazars et ses longs cheveux de sombre tombant en abondance autour de son corps, elle devait lui offrir une vision effarouchée et bien vulnérable.

    - Qui...qui êtes vous?

    Voix claire et douce à l'oreille qui résonne entre la cime des arbres. La petite créature, anxieuse de ne pas connaitre les attentions du nouveau venu, finit par s'assoir dans l'herbe fraiche. Elle découpa cette silhouette étrange sans grande retenue. L'homme qui se tenait à quelques pas d'elle semblait...atypique. Des yeux encrés qui trahissent un regard vif, des tatouages qui courent jusque dans son cou, des boucles luisantes dans le décor idyllique, un contraste parfait avec sa peau laiteuse. Corps sinistre et inquiétant au premiers abords qui, pourtant, n'évoquait aucune peur réelle à la demoiselle qui le fixait. Aura triste. Emanation spirituelle pleine de contradictions.

    Elle attendit en silence, fée intriguée au milieu du parterre fleurit. Doucement, elle posa une main à terre pour se dresser sur ses jambes. Abandonnant à la volée le livre posée sur son corps encore brulant de sommeil. Comptes anciens et folklore oublié. Elle vacilla un peu, les membres engourdis qui eurent du mal à suivre la cadence inattendue. Ils avaient beaux être éloignés, il n'était pas dur de deviner que l'homme perdu était bien plus grand quelle. Il la surplombait d'une tête, peut être deux. 

    Deux êtres prient de court. Deux âmes qui s'effleurent du regard pour la toute première fois. Rencontre malencontreuse à l'abris des regards indiscrets. Sous la caresse d'une nature sauvage, Pomme le découvrit. Solitaire.

    Dimanche 5 Décembre 2021 à 17:30
    Cafevy

    milo andrea santini :

    Honteux d'une attention portée excessive, perdu dans des pensées percées par les rayons luisants glissant entre la verdure des ombrages feuillus, Milo pris au piège, comme un animal entre les feux d'une voiture qui fonçait à toute allure sur sa frêle composition. Sur une carcasse abimée qui se trainait lourdement, péniblement, à la force de jambes qui n'en étaient plus tout à fait constituée. A la force d'une pensée, aussi, qui ne tenait qu'à un fil, voltige maladroite et vaine qui n'attendait qu'une chute inévitable qui n'aurait trop su tarder, qu'il repoussait sans jamais vouloir l'accepter, étreinte maladive poussant à une fuite qui l'était tout autant.

    Immobilisé par une pensée stupide, celle qui lui murmurait qu'en restant impassible, sa silhouette finirait par disparaitre dans l'immensité verdoyante d'un décor bucolique, l'homme entendit pourtant une voix fluette portée par les effluves de brise qui caressait ses joues, sa peau, ses cheveux à peine attachés qui retombaient inlassablement de chaque côté de son visage, cadre ébène aux saturations ensoleillées.

    Qui êtes-vous.

    Bien des réponses qui s'accumulent dans son esprit, qui s'accumulent sur le bord de ses lèvres, Milo s'était pourtant bien gardé de toute parole. Un pas fait en avant. Puis un deuxième. Et encore un. La main sur un front étonnamment vierge, toile qu'il n'avait encore eu le temps de peindre et d'orner de courbes adroites, les yeux plissés, il tentait de discerner avec un peu plus de justesse les traits qui se détouraient à leur tour d'une arbre sous lequel ils étaient autrefois appuyés. Sommeil troublé par une intrusion qu'il n'avait calculé, c'était un sourire contrit aux lèvres, un sourire d'ange pris sur le fait d'une entreprise malheureuse, presque impudique, qu'il tentait de s'expliquer.

    — Je suis désolé, je ne voulais pas vous déranger. Je passais simplement par là, et, enfin, j'ai été appelé par la curiosité.

    Des années de pratiques qui trahissaient pourtant bien adroitement des langueurs d'ailleurs, la main se portait à sa nuque noircit de calligraphies, caresse penaude pour se donner un peu de contenance.

    — Je ne voulais pas vous faire peur.

    Il voulait se faire engloutir par l'obscurité qui régnait depuis bien trop longtemps sur le pays, sur le continent, dans le monde entier. Inclinaisons ancestrales au pessimisme alanguis, ce n'était qu'un portrait attaché à son cou, reposant contre son torse, qui lui donnait l'énergie nécéssaire pour se battre. Pour avancer, chaque jour, jusqu'à espérer retrouver, un autre jour, les visages de son enfance.

    — Je, hm, je vais vous laissez. Excusez-moi, encore.

    Un signe de tête, politesse enseigné par la matriarche aux allures de perfection qui attendait bien sagement au pays, les sourcils se fronçaient pourtant, penchant un corps élancé au dessus d'une couverture qui reposait désormais sur la fraicheur des herbes folles.

    — Vous avez laissée tomber votre livre.

    Prise délicate entre les doigts bagués, Milo se redressait, tendant sa trouvaille à l'importune qu'il avait négligemment importuné.




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